Le changement d'école de l'enfant est-il un acte usuel de l'autorité parentale?
De nombreuses écoles croient pouvoir satisfaire la demande de radiation ou d'inscription dans leur établissement, relative à un enfant mineur, émanant d'un seul titulaire de l'autorité parentale. L'autre parent se voit alors mis devant le fait accompli.
Les faits sont souvent découverts après la rentrée scolaire, et les Juges aux Affaires Familiales n'osent généralement pas ordonner un retour de l'enfant dans son ancien établissement, au risque de le perturber davantage.
C'est donc bien en amont qu'il faut agir, et faire savoir à l'établissement scolaire fréquenté par l'enfant que tout changement d'école est par principe refusé.
CE QUE DIT L'ARTICLE 372-2 DU CODE CIVIL:
La difficulté vient de l'application de l'article 372-2 du code civil, qui prescrit qu'"à l'égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l'accord de l'autre, quand il fait seul un acte usuel de l'autorité parentale relativement à la personne de l'enfant."
Cet article ne concerne pas les rapports entre les parents, mais uniquement les tiers, et notamment l'école.
La jurisprudence administrative applique l'article 372-2 du code civil en estimant que "l'administration appelée à prendre à la demande d'un des parents exerçant en commun l'autorité parentale avec l'autre parent, une décision à l'égard d'un enfant, doit apprécier si, eu égard à la nature de la demande et compte-tenu de l'ensemble des circonstances dont elle a connaissance, cette demande peut être regardée comme relevant d'un acte usuel de l'autorité parentale". "Dans l'affirmative, l'administration doit être regardée comme régulièrement saisie de la demande, alors même qu'elle ne se serait pas assurée que le parent qui la formule dispose de l'accord exprès de l'autre parent."
LA LEÇON DU CONSEIL D'ETAT:
Le juge administratif a été saisi par un parent mécontent de découvrir que son enfant avait été radié d'un collège et inscrit dans un autre, sans avoir été consulté, son autorisation en qualité de titulaire d'une autorité parentale commune n'ayant été demandée ni par le collège ni par le recteur appelé à donner son accord.
Le juge administratif condamne l'Etat, posant le principe que le changement d'école n'est pas un acte usuel, que la responsabilité de l'Etat est donc engagée et que le préjudice moral du parent ignoré doit être indemnisé.
L'affaire vient jusque devant le Conseil d'Etat, qui annule le jugement de première instance, et estime que la demande de changement d'école peut constituer un acte usuel de l'autorité parentale. L'administration doit rechercher "les circonstances dont elle a connaissance", et si rien au dossier ne laisse à penser que le second parent s'oppose à la demande, elle peut considérer que la demande est censée faite au nom des deux titulaires de l'autorité parentale.
Tel est le sens de l'arrêt du 13 avril 2018 rendu par le Conseil d'Etat, numéro 392949.
Si donc vous souhaitez être consulté à l'occasion d'un changement d'école, écrivez à l'établissement scolaire que toute radiation ne pourra intervenir sans votre accord exprès...
Restent les cas des inscriptions administrativement possibles sans certificat de radiation, contre lesquelles aucun acte préventif n'est envisageable.
Ce procédé est cependant la preuve de ce que vos droits ne sont pas respectés par l'autre titulaire de l'autorité parentale, et le Juge aux Affaires Familiales pourra en tenir compte à l'occasion d'une action en justice.
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